« L’oisiveté engendre le plaisir et le plaisir détourne petit à petit du devoir. »
Max Jacob.

Une main chaude et légère se posa sur sa hanche nue avant de glisser lentement dans le creux de ses reins lui arrachant un véritable ronronnement. Elle n’ouvrit pas les yeux mais s’avança et se blottit encore un peu plus contre ce corps doux et suave. Elle n’avait pas envie de se réveiller, elle était bien là, dans sa bulle.

La caresse se mua alors lentement en chatouilles, la pulpe des doigts se fit véritable arme et le réveil devint bientôt obligatoire. Elle pesta pour la forme mais se résigna bientôt à ouvrir les paupières, dévoilant à son bourreau ces billes bleues que formaient deux yeux de chat. Elle s’étira de tout son long, dévoilant ses formes voluptueuses au travers du drap.

-J’ai jamais compris pourquoi tu avais tant de mal le matin.
-C’est pas spécialement le matin expliqua t-elle d’une voix rendue pâteuse par le sommeil. C’est juste… Que j’aime pas me réveiller, peu importe l’heure.

Son bellâtre se leva bel et bien lui, avant de disparaître dans une des pièces adjacentes. Elle le trouvait toujours aussi beau même après plusieurs années à ses côtés. Et en plus il avait cette faculté dingue à toujours avoir la peau brûlante, ce qui s’avérait fort utile quand on vivait à la forteresse d’Altgard.

Elle soupira légèrement, qu’allait-elle faire aujourd’hui ? Il faudrait qu’elle s’entraîne, elle ne l’avait plus fait depuis quelques jours et à force elle allait rouiller. Rungnir allait encore lui mettre la tête au carré parce qu’elle ne s’était pas présentée depuis deux jours. Nouveau soupir. Qu’elle idée elle avait eu de rejoindre la milice humaine d’Altgard alors qu’elle pouvait passer ses journées au chaud, douillettement installée chez son homme.

-Tu vas en prendre pour ton grade tu sais, entendit-elle de l’autre pièce. Allons bon, s’il s’y mettait aussi elle n’était pas sortie de l’auberge.
-Flemme… Et puis j’en ai marre de crapahuter dans la neige et le froid. C’est facile pour eux, les Daevas, ils sentent plus rien, ronchonna Lumen.
-C’est pas ce que j’ai entendu et puis… Une tête apparue dans l’embrasure de la porte, tu n’avais pas le « don » où je ne sais pas trop quoi ?
-Mmmm-ouais… Y a un vieux schnock qu’est venu à Basfelt un jour, m’a dit de me tenir prête et de m’exercer. Je l’ai fait et…
-Et ?
-Et je suis là, dans ton lit, et les seules plumes sont celles des oreillers.

Il haussa les épaules et disparut de nouveau derrière un pan de mur.

-Et ça dure depuis des années… murmura t-elle pour elle-même, amère.

Peut-être était-ce sa faute. Peut-être avait-elle abandonné en se laissant aller. Au début quand elle était venue à Altgard c’était dans l’unique but de devenir encore plus forte, d’acquérir encore plus de pratique, d’endurance et de maîtrise. Être capable de manier l’éther, de le ressentir et d’en faire un usage toujours plus précis… Mais elle y avait trouvé autre chose : une vie -certes entourée de neiges éternelles- mais aussi animée, joviale et légère. Personne ne la connaissait, personne pour l’affubler de pseudonymes débiles… Personne. Même pas elle : elle s’était perdue en route, au milieu des coussins, des nuits blanches et des tours de garde.

Avec des mouvements lents elle se releva et entreprit de s’habiller. Il fallait qu’elle se bouge comme disait son père, qu’elle s’active. Elle n’avait pas quitté Basfelt pour rien, elle avait eu une raison de tout laisser derrière elle : un but. Et il était plus que temps de le poursuivre de nouveau.

Arc et flèches étaient toujours près de l’entrée, elle s’en équipa avec plus ou moins d’entrain car même avec la meilleure volonté du monde… Elle détestait crapahuter dans la neige.

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