Durant trois mois ils traversèrent Asmodée, restant toujours à l’écart des hommes et des daevas. Le corps de Saraban s’était remis de ses blessures mais elle restait toujours aussi silencieuse. Un soir ils finirent par arriver dans une grande vallée en haute montagne après avoir passé les ruines d’une ancienne forteresse. Ils campèrent non loin d’un village abandonnés depuis des années.
Les semaines qui suivirent, Prane et Kiba les occupèrent à restaurer une des maisons. L’enfant loup avait décidé qu’ils emménageraient ici pour un certain temps. Celui du moins qui permettrait à une des louves de la meute de mettre bas.
Le jour venu, Kiba et le jeune Priole revenant de la tanière où ils avaient laissé la louve afin qu’elle puisse donner la vie en toute quiétude trouvèrent Saraban au bord de la maison qu’ils occupaient. Elle était en train d’enfouir dans le sol un coffret. Elle tourna la tête et les fixa du regard. Cherchant les yeux de l’enfant loup.
« Je suis Inuzuka Saraban Elensar et tu es mon loup. »
Depuis le jour où elle avait ouvert les yeux, elle l’avait vu à ses côté, se démenant sans cesse pour son bien-être, à la chérir, à la soigner, à la nourrir, à veiller sur elle d’un amour indéfectible. Pas un instant il n’avait montré la moindre résignation, pas une fois il n’avait faibli. Elle s’était finalement réveillée. Elle se releva et vint se serrer dans les bras du jeune daeva. A cet instant, à l’abri des rocher, sous la terre, une louve hurla, le premier de ses trois louveteaux venait de voir le jour.
Les premiers flocons tombaient sur la vallée en cette veillée d’automne. Ils avaient à deux reprises gagnés la ville dans la plaine pour y acquérir quelques biens manufacturés, notamment de l’encre et du papier. Papier que Kiba relisait en corrigeant les exercices d’écriture de Saraban et de Prane. Tous deux s’étaient lancés un défi tacite à celui qui apprendrait et pratiquerait au mieux la langue des Inuzuka. Ce soir là Saraban vint l’interrompre dans ses corrections et lui murmura quelque chose à l’oreille. Ce qu’elle avait dit fit à l’enfant loup poser sa plume et refermer l’encrier. Il lui prit la main et l’emmena vers leur chambre, laissant le jeune Prane qui jouait avec les louveteaux les regardant passer en souriant.
L’été approchait rapidement lorsque leur tanière résonna de trois nouveaux timbres auxquels vinrent s’ajouter le mois suivant les jappements des quatre louveteaux de la portée de Tenshi et de Kuri. Les fiers canidés ayant désignés Prane comme compagnon sous la tutelle de Kiba.
La belle saison se révéla infernale pour l’enfant loup, mais il était des plus comblé. Toute la meute se mobilisait pour les aider ainsi que Prane qui devait faire face à quatre petits démons. Tout aurait pu être gérable s’il n’y avait eut ces pointes rouges qui étaient apparus sur les jugulaires de Saraban et qui grandissaient de jour en jour, s’étirant en forme de crocs. La jeune femme avait alors reçu des loups et de son loup le surnom de Louve de la Colère. Kiba endurait les râles et les reproches sans rien dire car il savait qu’elle ne lui en voulait pas et qu’au fond cela ne la dérangeait guère trop vu qu’il l’avait surprise à plusieurs reprises en train de les admirer dans le miroir.