Plusieurs centaines d’hommes et de femmes. Des engins de siège, des montures, des râteliers d’armes ambulants. Et le bruit. Le vrombissement de cette gigantesque construction emplissait l’air tout autour, résonnait jusque dans ses os. Et cette couleur. Verte. Qui tournoyait, ondulait, derrière il lui semblait voir l’infini de l’espace, des étoiles à perte de vue.

Un soldat plus zélé que les autres passa à côté d’elle en la bousculant, le choc des protège-épaules en plaque se répercuta dans ses oreilles la faisant brusquement revenir à la réalité.

- T’excuses pas surtout !

Mais il était déjà loin. Comme les autres elle attendait, en rang, perchée sur son destrier, son armure lui tenait chaud, son arme et son bouclier lui vrillaient le dos. Des heures qu’elle faisait le pied de grue devant ce « truc ». Un des mages lui avait dit qu’il s’agissait d’une porte. La Porte. Celle qu’avaient emprunté les Orcs la première fois. Un gros machin vert qui faisait un bruit du diable, c’était tout ce qu’elle voyait.

Un cor résonna, suivit d’un autre, puis d’un autre. Chacun alerta le corps d’armée qui lui était destiné. L’Infanterie, la Cavalerie, le Siège… Tiwel s’ébroua et se mit en marche, suivant la cadence molle et répétitive des autres chevaux devant lui. Son détachement s’avançait vers le vortex, l’idée fugace qu’elle allait se faire engloutir la traversa et elle la balaya d’un revers de la main. Ce n’était pas le moment. Elle n’avait même pas peur, non, elle n’attendait que ça, en découdre.

Le cor de la Cavalerie retentit de nouveau et un frisson s’empara d’elle. Elle savait sa fille en sécurité, et personne d’autre ne comptait. Elle allait pouvoir se battre sans penser à rien, sans rien pour la freiner. Un sourire mauvais se dessina sous son casque. Elle avait hâte.

La lente procession des destriers s’engouffrait par la Porte et bientôt se fut son tour, elle garda les yeux grand ouverts mais ne vit rien jusqu’à ce que se dessine devant elle les corps colossaux des Commandants des Abîmes. Ces démons qui se dressaient vers le ciel. On leur en avait parlé juste avant qu’ils se rassemblent. Quelques destriers se cabrèrent et se mirent à ruer, proprement affolés par la vue de ces horreurs. Sous elle, elle sentit Tiwel frémir. Elle lui flatta doucement l’encolure.

- Bientôt mon grand…

Le calme revint dans les rangs et on leur fit signe de bifurquer vers la gauche. Le campement avancé de l’Alliance était de ce côté. De l’autre… Elle apercevait celui de la Horde.
Le Commandant Duron se chargea de les « accueillir ». L’arrivée en Outreterre était faite. Il était maintenant temps de prendre part au combat. Il ne fallait même pas songer à retourner en arrière.

Son détachement de Paladin fut séparé en plusieurs sections. Elle fut envoyée vers un certain Amish Marteau-Hardi, très probablement du clan du même nom, avec cinq autres cavaliers. On leur confia un griffon chacun, des cartes et de quoi tenir pendant tout le voyage. Ombrelune, c’était leur destination. Bastion des Marteaux-Hardis plus précisément. On leur expliqua que la Légion y avait un bastion important, que la région était prise d’assaut par des morts-vivants, des démons de toutes sortes et bien d’autres choses encore. Leurs destriers emprunteraient la voie terrestre, ils serviront au convoi d’armes le temps de faire le trajet. Elle en connaissait un qui n’allait pas apprécier. Tant pis.
Les autres paladins confièrent leurs montures avec plus ou moins de réticence. Et ils se dirigèrent vers les griffons cuirassés qui les attendaient un peu plus loin.

Une femme du groupe les interpella, Dedjinn remarqua qu’elle tremblait. Elle l’avait déjà vu tout à l’heure dans le cortège.

- Vous… Vous croyez qu’on va trouver quoi là-bas ? J-je veux dire à « Ombrelune »

Elle la dévisagea quelques secondes avant de lui tourner le dos pour enfourcher sa nouvelle monture.

- Retourne d’où tu viens. T’as rien à faire ici. T’as peur et ça nous apportera que des emmerdes.

Un coup de talon sec et le griffon s’envola

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